THEATRE : les succès et les échecs de l'automne
Malgré des pièces de qualité, les spécialistes parlent d'une baisse «dramatique» de fréquentation des théâtres parisiens privés.
«Globalement dramatique», tel est le mot de la profession pour qualifier la fréquentation des salles privées parisiennes. Selon le palmarès hebdomadaire des théâtres privés établi par la SACD que nous nous sommes procuré, de nombreuses pièces ne rencontrent pas le succès escompté : Equus de Peter Shaffer avec Bruno Wolkowitch, au Marigny (12,5 % seulement de taux de remplissage pour la semaine du 12 octobre), Clérambard de Marcel Aymé avec Jean-Marie Bigard au Théâtre Hébertot (18 %), Elle t'attend de Florian Zeller avec Laetitia Casta, à la Madeleine (30 %, la pièce devrait toutefois se maintenir jusqu'en décembre) et Les Deux Canards au Théâtre Antoine avec Isabelle Nanty et Yvan le Bolloc'h (40 %). Pour rentrer dans ses frais, un théâtre doit avoir un taux d'occupation minimum de 60 %.
«Depuis un moment, il y a un problème de pouvoir d'achat. On sent que les gens rabiotent sur les loisirs», constate Bertrand Thamin, directeur du Montparnasse. «On n'a jamais besoin d'aller au théâtre, mais on a toujours besoin d'acheter du pain ou de la viande. Le climat est morose, mais ce n'est pas catastrophique. On est loin de la guerre du Golfe où tout s'est arrêté , tempère Georges Terrey, président du syndicat des directeurs de théâtres privés. C'est évident qu'on sent un fléchissement dans la fréquentation, pourtant, il est trop tôt pour tirer des conclusions, il faut observer les pièces dans la durée.»
Des horaires tardifs
À la tête du Théâtre des Nouveautés depuis trente-trois ans, Denise Moreau-Chantegris constate aussi une baisse de la clientèle. «En partie en raison de la crise financière, mais plus sûrement à cause des horaires trop tardifs des représentations. Depuis quinze jours, j'ai donc décidé de proposer Ma femme est parfaite (une comédie avec Patrice Laffont, NDLR) les lundis à 19 h 30 au lieu de 21 heures, signale-t-elle. Les médias n'aident que les grosses pièces qui n'en ont pas besoin. En plus, il est impossible de se garer dans Paris et un parking augmente le prix de la soirée. On reproche aux théâtres d'être chers, mais le kiosque, la Fnac et Internet offrent des réductions.» Seule une poignée de pièces triomphent : Faisons un rêve, de Guitry, avec Pierre Arditi au Théâtre Édouard-VII (94 % de taux de remplissage), Le Diable rouge, avec Claude Rich au Montparnasse (72 %) et Le Malade imaginaire, de Molière, avec Michel Bouquet à la Porte-Saint-Martin (75 %, une «légère déception», car d'habitude, le comédien atteint les 90 %). «O n a été pratiquement plein au bout de quatre jours, indique Bernard Murat, directeur d'Édouard-VII. Comme disait Louis Jouvet : “Une générale réussie n'est jamais qu'une suite de catastrophes évitées de justesse”. Le succès est toujours une heureuse surprise. On nous avait pourtant affirmé que la télévision tuait le théâtre(Faisons un rêve a été retransmis en direct sur France 2 en 2007, NDLR).» Bonne rentrée aussi pour le semi-public, en particulier au Rond-Point avec Perthus, La Divine _Miss V et Les Diablogues.
«Une alchimie mystérieuse»
Les raisons d'un succès sont à la fois simples et complexes : «C'est le résultat d'une alchimie mystérieuse. Il faut avoir la bonne pièce au bon moment dans la bonne salle avec les bons comédiens et la bonne mise en scène», définit Bertrand Thamin. Les têtes d'affiche ne sont pas étrangères à l'affaire. Ainsi, Michel Leeb, qui démarre fort avec Parle-moi d'amour (73 % et devrait passer le cap des 90 %), Michel Sardou (Secret de famille), ou Zabou Breitman, qui a relevé un pari risqué en adaptant deux documentaires de Depardon (Des gens au Petit _Montparnasse), ont leurs fidèles qui leur permettent de commencer sur les chapeaux de roues.
Plusieurs «petites» salles tirent également leur épingle du jeu avec des reprises de qualité : La Vie devant soi, avec Myriam Boyer, avec 87 % de taux de remplissage (voir encadré),Le Tour du monde en 80 jours, au Café de la Gare, qui a dépassé la 670e représentation ou Chat et souris à la Michodière, qui en compte près de 400. Les spécialistes refusent de tomber dans le défaitisme et tiennent à rester confiants pour l'avenir. «Le public se dit peut-être qu'il sortira une fois au théâtre au lieu de trois, mais ça va passer, haut les cœurs !» lance Bernard Murat.
Nathalie Simon -17/10/2008
Malgré des pièces de qualité, les spécialistes parlent d'une baisse «dramatique» de fréquentation des théâtres parisiens privés.
«Globalement dramatique», tel est le mot de la profession pour qualifier la fréquentation des salles privées parisiennes. Selon le palmarès hebdomadaire des théâtres privés établi par la SACD que nous nous sommes procuré, de nombreuses pièces ne rencontrent pas le succès escompté : Equus de Peter Shaffer avec Bruno Wolkowitch, au Marigny (12,5 % seulement de taux de remplissage pour la semaine du 12 octobre), Clérambard de Marcel Aymé avec Jean-Marie Bigard au Théâtre Hébertot (18 %), Elle t'attend de Florian Zeller avec Laetitia Casta, à la Madeleine (30 %, la pièce devrait toutefois se maintenir jusqu'en décembre) et Les Deux Canards au Théâtre Antoine avec Isabelle Nanty et Yvan le Bolloc'h (40 %). Pour rentrer dans ses frais, un théâtre doit avoir un taux d'occupation minimum de 60 %.
«Depuis un moment, il y a un problème de pouvoir d'achat. On sent que les gens rabiotent sur les loisirs», constate Bertrand Thamin, directeur du Montparnasse. «On n'a jamais besoin d'aller au théâtre, mais on a toujours besoin d'acheter du pain ou de la viande. Le climat est morose, mais ce n'est pas catastrophique. On est loin de la guerre du Golfe où tout s'est arrêté , tempère Georges Terrey, président du syndicat des directeurs de théâtres privés. C'est évident qu'on sent un fléchissement dans la fréquentation, pourtant, il est trop tôt pour tirer des conclusions, il faut observer les pièces dans la durée.»
Des horaires tardifs
À la tête du Théâtre des Nouveautés depuis trente-trois ans, Denise Moreau-Chantegris constate aussi une baisse de la clientèle. «En partie en raison de la crise financière, mais plus sûrement à cause des horaires trop tardifs des représentations. Depuis quinze jours, j'ai donc décidé de proposer Ma femme est parfaite (une comédie avec Patrice Laffont, NDLR) les lundis à 19 h 30 au lieu de 21 heures, signale-t-elle. Les médias n'aident que les grosses pièces qui n'en ont pas besoin. En plus, il est impossible de se garer dans Paris et un parking augmente le prix de la soirée. On reproche aux théâtres d'être chers, mais le kiosque, la Fnac et Internet offrent des réductions.» Seule une poignée de pièces triomphent : Faisons un rêve, de Guitry, avec Pierre Arditi au Théâtre Édouard-VII (94 % de taux de remplissage), Le Diable rouge, avec Claude Rich au Montparnasse (72 %) et Le Malade imaginaire, de Molière, avec Michel Bouquet à la Porte-Saint-Martin (75 %, une «légère déception», car d'habitude, le comédien atteint les 90 %). «O n a été pratiquement plein au bout de quatre jours, indique Bernard Murat, directeur d'Édouard-VII. Comme disait Louis Jouvet : “Une générale réussie n'est jamais qu'une suite de catastrophes évitées de justesse”. Le succès est toujours une heureuse surprise. On nous avait pourtant affirmé que la télévision tuait le théâtre(Faisons un rêve a été retransmis en direct sur France 2 en 2007, NDLR).» Bonne rentrée aussi pour le semi-public, en particulier au Rond-Point avec Perthus, La Divine _Miss V et Les Diablogues.
«Une alchimie mystérieuse»
Les raisons d'un succès sont à la fois simples et complexes : «C'est le résultat d'une alchimie mystérieuse. Il faut avoir la bonne pièce au bon moment dans la bonne salle avec les bons comédiens et la bonne mise en scène», définit Bertrand Thamin. Les têtes d'affiche ne sont pas étrangères à l'affaire. Ainsi, Michel Leeb, qui démarre fort avec Parle-moi d'amour (73 % et devrait passer le cap des 90 %), Michel Sardou (Secret de famille), ou Zabou Breitman, qui a relevé un pari risqué en adaptant deux documentaires de Depardon (Des gens au Petit _Montparnasse), ont leurs fidèles qui leur permettent de commencer sur les chapeaux de roues.
Plusieurs «petites» salles tirent également leur épingle du jeu avec des reprises de qualité : La Vie devant soi, avec Myriam Boyer, avec 87 % de taux de remplissage (voir encadré),Le Tour du monde en 80 jours, au Café de la Gare, qui a dépassé la 670e représentation ou Chat et souris à la Michodière, qui en compte près de 400. Les spécialistes refusent de tomber dans le défaitisme et tiennent à rester confiants pour l'avenir. «Le public se dit peut-être qu'il sortira une fois au théâtre au lieu de trois, mais ça va passer, haut les cœurs !» lance Bernard Murat.
Nathalie Simon -17/10/2008